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Podcast de Ian CORLESS - TalkUltra - avec Cyril GAUTHIER

« Si tu n’es pas fou, ne fais pas ce boulot »

Retrouvez la retranscription du podcast réalisé par Ian CORLESS, journaliste et photographe britannique spécialisé en ultra-trail, et particulièrement attaché au MARATHON DES SABLES depuis plus de dix ans. Son invité, Cyril GAUTHIER, est le nouveau dirigeant du MARATHON DES SABLES.

Vous pouvez écouter le podcast sur le site de Ian CORLESS TalkUltra (1h12mn).

 

Ian CORLESS : Bienvenue Cyril sur ce podcast.

Cyril GAUTHIER : Merci Ian, c’est un grand plaisir de parler à un tel expert du MDS. Et je m’excuse par avance de mon pauvre niveau en anglais. Le niveau d’anglais des Français est un problème, et c’est aussi un problème sur le MDS : il n’y a pas assez de bénévoles qui parlent correctement anglais. C’est un problème que nous allons corriger à l’avenir.

 

Pas de souci Cyril, ton anglais est parfaitement compréhensible. Peux-tu nous en dire un peu plus sur ton background, comment tu t’es intéressé aux courses à étapes, au MARATHON DES SABLES ?

L’histoire est simple. En 2009, j’ai participé au MDS comme n’importe quel coureur. J’ai été très surpris. Pour moi, c’est plus qu’une simple course. J’ai couru pas mal d’ultras, comme l’UTMB, l’Ultra-Trail du Mont Fuji. Toutes ces courses ont été magiques pour moi, et donc en 2009 j’ai fait le MDS. Et honnêtement, il a changé ma vie car il a été très spécial pour moi. À partir de là, j’ai réfléchi à ce que je pouvais faire de plus pour le MDS. J’ai rencontré Patrick et Marie BAUER, le couple à l’origine et à la tête du MDS, et j’ai fait mon travail. Mon travail, c’est de gérer la logistique de gros groupes en Europe. Et j’ai commencé à faire la même chose pour le MDS. C’était en 2010, et c’était déjà très bien, nous avons mis en place la première boutique pour la marque MARATHON DES SABLES. Nous avons continué à parler, et après de nombreuses réunions, j’ai pris des parts dans la société. C’est là que ma collaboration avec Patrick et Marie a réellement débuté.

 

Et c’est à cette époque que la marque WAA est née ? Désormais, le sac à dos WAA jaune et noir est indissociable du MARATHON DES SABLES.

C’est bien ça. En 2012, Marie a évoqué le fait que nous devions proposer un sac à dos 100% adapté au MDS. Je leur ai dit que je savais faire ça, mais que ça prendrait un peu de temps. Nous avons alors commencé à développer l’ULTRA BAG. Et nous avons été très surpris : ça a été un succès immédiat et massif. Après ça nous avons commencé à développer des objets dédiés aux coureurs et adaptés au désert. Aujourd’hui, cette marque existe toujours et produit des équipements parfaitement adaptés aux épreuves désertiques, mais aussi aux autres épreuves de course à pied. Et nous continuons à étendre la gamme et à améliorer les produits.

 

Dans tes premières années sur le MDS, tu étais très visible aux côtés de Patrick. Qu’est-ce que ça représentait d’être de l’autre côté de la ligne, de participer au développement de l’épreuve, en opposition avec être un simple coureur ?

Pendant quatre ou cinq ans, mon boulot était très simple : être l’ombre de Patrick. Essayer de comprendre au mieux la course, voir ce que je pouvais apporter, ce qui pouvait être amélioré. Nous avons échangé durant ces quatre ou cinq ans avec Patrick et Marie, et nous avons par exemple changé le système de communication. Marie, de son côté, était contente de ces évolutions, et Patrick un peu moins, il me disait « Cyril, tu en veux toujours plus. Peut-être que tu devrais lancer ta propre course pour expérimenter ces évolutions. » Dans l’imaginaire collectif, le MDS est souvent associé à une course impossible, réservée à une élite. De mon côté, je pense que le MDS était une course extrêmement difficile, mais que si tu es bien préparé, que tu as les bonnes informations en amont, tu peux venir à bout de cette course folle. Alors j’ai proposé à Patrick et Marie un nouveau format, plus simple, et sur lequel nous pourrions essayer certaines évolutions du MDS : les HALF MDS. Le Pérou a été le coup d’envoi de ces nouveautés.

 

Mais la première édition au Pérou a été un MDS complet, une copie de celui qui se déroule au Maroc. Quel process t’a amené à diviser la distance par deux dorénavant ?

En 2011, il y a eu les Printemps Arabes, et nous nous sommes posé la question de créer un MDS ailleurs qu’en Afrique du Nord. Bien sûr, tout est toujours ok au Maroc, mais c’était un moyen de chercher à sécuriser l’événement. Nous avons alors créé ce MDS au Pérou, et si ça a été excellent pour les coureurs, pour l’organisation ça a été un cauchemar. Ça a été la pire expérience de ma vie, car en amont si nous avions parlé avec les autorités et que ça s’était très bien passé, en pratique ils ne savaient pas comment travailler sur le terrain. Et ça a été terrible. Mais pour les coureurs, comme beaucoup l’ont exprimé après, ça a été une expérience marquante. Après ça, nous nous sommes dit « ok, on sait qu’on peut le faire. On sait que c’est énormément d’énergie à investir. Peut-être que ce serait plus simple de proposer juste un HALF MDS ? » Et c’est ce que nous avons fait. Mais nous savons que nous pouvons réaliser un MDS ailleurs dans le monde.

 

Je dois dire que j’ai adoré cette première édition au Pérou. Le désert d’ICA est unique, les dunes sont fantastiques, et la proximité avec l’océan ajoute quelque chose de très différent. C’était donc le point de départ des HALF MDS, et je dois dire que c’est une bonne chose : ils permettent de se tester, d’ajuster son équipement, son entraînement, d’expérimenter les conditions désertiques, avant le MDS. Mais désormais les HALF MDS ont grandi et sont devenus des événements à part entière, pas juste une manière d’accéder au MDS. Comment as-tu vécu cette période ?

C’est très intéressant, parce que les HALF MDS sont très différents du MDS. Bien sûr, tu peux apprendre beaucoup de choses par rapport au désert, l’environnement, les températures, le terrain, qui te seront très utiles sur le MDS. Parce que quand tu es sur le MDS, si tu fais la moindre erreur, tu peux être contraint à l’abandon. Et c’est pour ça que tu t’intéresses aux HALF MDS à la base. Mais c’est aussi très intéressant de voir des déserts différents, des terrains différents, des paysages différents. Pour moi, le MDS au Maroc sera toujours le premier et le meilleur parce qu’il est un mix de tout, mais c’était très excitant de prouver qu’on peut découvrir des déserts si différents et apprendre des choses si différentes. L’année prochaine, nous aurons 7 destinations, et nous allons fusionner les marques MDS et HMDS. Le tout premier MARATHON DES SABLES, au Maroc, deviendra le « MDS the Legendary », et toutes les autres destinations prendront le nom de MDS : MDS Jordania, MDS Egypt, MDS Namibia… Le Legendary sera le seul à 240 km, sur les autres les coureurs pourront choisir de faire 70, 100 ou 120 km, en trois étapes.

 

On dirait que ça se rapproche un peu du circuit UTMB, avec des événements qualificatifs pour accéder à l’épreuve reine. Est-ce ce que tu envisages pour le MDS ?

Non, pas du tout. Je connais Catherine et Michel POLETTI depuis des années, et nous échangeons beaucoup sur l’avenir de nos épreuves. Mais le MDS est très différent de l’UTMB. Le MDS n’est pas qu’une affaire de course à pied, nous parlons beaucoup de l’avenir, de la nature, de la planète. Nous devons proposer une course folle, nous devons nous éclater dans le désert, mais nous avons d’autres missions, à plus long terme.

 

Jusqu’à récemment, le taux de Finishers a été très élevé. Mais depuis deux, trois ans, il s’est abaissé. Mais malgré ça, le MDS reste très accessible si tu t’y rends avec le bon état d’esprit. C’est une épreuve qui a montré la voie pour toutes les courses à étapes dans le monde. C’est le grand-père, celui qui a inspiré tous les autres. Patrick BAUER est la figure emblématique associée à cette épreuve. Patrick est si passionné, si associé au MDS. Avec ce changement, beaucoup se posent des questions sur le futur. Comment peux-tu rassurer les gens sur le fait que l’expérience du MARATHON DES SABLES sera identique, voire meilleure à l’avenir ?

Tu as entièrement raison. Patrick et Marie ont créé et géré la course ensemble, même si en 34 éditions on n’a jamais vu Marie sur le devant de la scène. On dit toujours que derrière chaque grand homme il y a une femme, et dans le cas du MDS, c’est on ne peut plus vrai. Mais on ne voit pas non plus l’équipe derrière Patrick, et cette équipe sera toujours là à 100%. C’est vraiment important pour moi. Patrick va continuer à se charger de l’association Solidarité MARATHON DES SABLES, il va pouvoir prendre du temps pour la développer. Après 37 éditions du MDS, il est un peu fatigué des responsabilités. Entre 2010 et 2014, il m’a dit que j’étais là pour prendre soin du futur de l’épreuve, parce qu’il n’allait pas faire ça encore des années. Le plus important est de comprendre que nous n’allons pas changer les règles majeures ni les équipes. Des gens comme Joko, Mathieu, travaillent depuis tant d’années pour le MDS, je les appelle les « invisibles », et ils font un travail de fou, et c’est pourquoi je ne vais pas devenir le Directeur de Course. Nous allons établir un Comité Directeur avec sept ou huit personnes. Bien sûr, nous allons changer de petites choses, mais en gardant l’ADN de la course. Par exemple, nous avons commencé à questionner les participants sur leur ressenti sur l’épreuve après le 37e MDS, ce qui n’était jamais fait auparavant, sauf du côté britannique grâce à Steve, le représentant du MDS en Grande-Bretagne. C’est important pour nous d’avoir le ressenti des coureurs. On obtient des retours très intéressants, et on va adapter certaines choses sur le terrain pour être sûrs de satisfaire le plus grand nombre. Je reviens sur la problématique de l’anglais : j’ai souvent dit aux coureurs britanniques « si tu veux vivre un superbe MDS, tu dois bien t’entraîner, réfléchir à ta nourriture, mais surtout tu dois apprendre le français ! » C’est une honte pour nous de parler si mal l’anglais. C’est pourquoi nous allons recruter plus de bénévoles de Grande-Bretagne. C’est un exemple mais c’est très important. Le briefing, c’est un autre exemple : il démarre souvent 15 minutes en retard. Quand Patrick parle en français, c’est ok pour tout le monde, et quand la traduction en anglais arrive, les Français parlent entre eux. Nous allons changer ceci, peut-être en débutant par le briefing en anglais puis ensuite le français. Les changements ne sont pas exceptionnels, ce sont plutôt des ajustements, mais ils rendront l’expérience globale meilleure. Ils sont orientés vers les coureurs.

 

Le MDS est une course internationale, les Français et les Anglais sont les plus nombreux, mais il y a tant de pays représentés chaque année. C’est un des points forts du MDS, rassembler tous ces gens différents au milieu du désert. Tu as évoqué Steve qui s’occupe du contingent britannique et qui chaque année organise une exposition MDS, envisages-tu ce genre de choses pour les Français ou dans d’autres pays ?

Steve est un incontestable leader pour les Britanniques, il a mis en place de très bonnes choses pour eux. C’est intéressant pour nous de nous en inspirer et de reproduire ce qui marche le mieux dans d’autres pays. C’est notre travail, notre responsabilité. Un exemple : le prix d’inscription à une telle épreuve est très élevé. Et si vous avez le moindre problème avant la course, un problème familial, une blessure, vous risquez de perdre une grosse somme d’argent. Eh bien nous mettons en place à partir de 2024 la possibilité de reporter gratuitement son inscription à l’année suivante. Le message c’est « Ne vous inquiétez pas avec ça. » Nous avons déjà mis en place ce report sur les HALF MDS et les coureurs nous ont dit à quel point ça les rassurait.

 

C’est évidemment un très bon point dans le climat actuel. Parlons des changements à partir de 2024, à commencer par l’étape Solidarité, la sixième étape, qui faisait de 8 à 15 km, qui ne faisait pas vraiment partie de la course mais permettait de collecter des fonds pour l’association du MDS et celles des participants, avant que les participants remontent dans les bus et reviennent à la civilisation. Certains l’appréciaient vraiment beaucoup, car ça leur permettait de faire quelques kilomètres avec les autres personnes de leur tente, mais globalement les coureurs ne comprenaient pas bien cette étape : la course se termine la veille, chacun a reçu sa médaille, maintenant tout le monde a envie d’aller à l’hôtel et de prendre une douche. Donc désormais la course se fera en 5 étapes, ce qui me parait beaucoup plus compréhensible. Mais qu’en est-il de l’aspect charity, levée de fonds ?

J’aimais beaucoup cette étape Solidarité que nous avons mise en place avec Patrick et Marie. Tu sais, en France, nous n’avons pas cette culture britannique de levée de fonds, pour vous c’est beaucoup plus naturel. Alors certes cette étape permettait aux coureurs de partager un moment avec leurs amis, mais ils peuvent aussi le partager avec une bière à leur hôtel. En réalité, la mise en avant de la solidarité par cette étape n’est pas si efficace. Nous avons besoin de faire quelque chose de beaucoup plus fort. C’est pourquoi la dernière étape, la cinquième, l’étape marathon, va devenir l’étape Solidarité. Notre mission est de montrer que nous ne faisons pas de l’ultra que pour notre plaisir, mais que ceci peut nous aider à changer le monde. Notre planète souffre, de très nombreuses personnes souffrent, nous savons cela mais nous ne faisons pas grand-chose. J’aimerais que le MDS soit un levier nous permettant d’influencer positivement le monde. Je pense qu’en expliquant aux coureurs qu’ensemble, on est capable de faire de grandes choses, ils pourraient accepter cette mission : vendre chacun de ses kilomètres de l’étape Marathon, ou même, pourquoi pas, de la totalité du MDS. Ce n’est pas une compétition avec les associations soutenues par les coureurs, c’est juste une cause commune, une manière de donner un sens global à cette épreuve, à ce rassemblement. Nous proposons un projet concret, commun, pour les océans, les pandas… Nous rassemblons ainsi une grosse somme d’argent, et pas que pour le MDS The Legendary, mais pour tous les MDS dans le monde. Si tu fais un rapide calcul, en 2024, avec 8 courses, on parle de 6 millions d’euros en vendant chaque kilomètre 10 euros. Bien sûr, ça ne sera sans doute pas parfait au début, mais au moins ce sera un début, et je suis sûr que les coureurs verront la force de ce projet. Si on y croit, on peut réaliser de grandes choses, et pas seulement au Maroc, ou dans les autres pays dans lesquels se déroulent les MDS, mais en Europe aussi. Mais nous devons faire ça tous ensemble. Bien sûr, il y aura des ajustements à faire, des choses à expliquer, mais c’est à ça que je pense depuis le début. Et dans cinq ans peut-être, nous pourrons lever chaque année 10 millions. C’est sans doute complètement fou, mais c’est exactement ce que Patrick nous a enseigné : « Si tu n’es pas fou, ne fais pas ce boulot ». Et le MDS est une preuve que ça marche. Qui aurait pu imaginer il y a 37 ans qu’une course dans le désert avec seulement un sac à dos fonctionnerait ?

 

Un autre changement pour 2024, c’est l’autosuffisance alimentaire dès le début de l’événement. Auparavant, les coureurs étaient nourris jusqu’au premier jour de course. Ça a suscité des réactions négatives. Mais aussi des positives, notamment de la part de personnes qui ont dû abandonner très tôt dans la course à cause de troubles alimentaires. Peux-tu nous dire ce qui a amené cette décision ?

J’apprécie l’idée de manger tous ensemble avant que la course démarre, ça te permet de discuter avec tout le monde. Mais les réponses aux questionnaires envoyés aux participants nous ont montré qu’ils étaient déjà nombreux à ne pas aller prendre les repas de l’organisation. Les raisons : l’attente, et le risque d’attraper une bactérie qui pourrait anéantir leurs efforts. La crise du Covid a changé la donne. C’est quelque chose qui peut revenir, sous cette forme ou une autre. Donc on va prendre un maximum de précautions. Après la course, la question ne se pose pas. Et je suis surpris, d’ailleurs, qu’après la course il n’y ait pas un dîner de gala, quelque chose qui rassemble tout le monde comme sur les HALF MDS. Pas juste un dîner pour les coureurs, mais une grande cérémonie qui rassemble le staff et les coureurs, les « invisibles » comme je disais, c’est génial. Mais ça, c’est après la course. Avant, tu dois te concentrer sur ta course, mettre toutes les chances de ton côté. Nous mettrons ceci en place en 2024, et nous verrons ce que ça donne. Pour moi ce n’est pas un problème de revenir en arrière si nous avons fait fausse route. Mais quand on parle de ces repas avec les coureurs, avec les docteurs qui supervisent l’événement, c’est un risque. Et mon boulot c’est d’éviter un maximum de risques pour les coureurs. Le point clé quand on organise un tel événement, c’est la sécurité des coureurs. Ça doit être le cas pendant la course, mais aussi avant et après. Certaines personnes sont mécontentes de cette décision, je peux le comprendre. Mais nous verrons. Pour moi le plus important, c’est la connexion entre les personnes. Par exemple, je ne sais pas si nous le testerons en 2024, mais j’aimerais qu’une nuit, une nuit sans nuages, tout le monde, tout le bivouac, dorme à l’extérieur de sa tente, face aux étoiles. Tout le monde peut se sentir connecté, sans que ça nuise à la sécurité des coureurs ou à leur capacité à finir la course. Nous avons plein d’idées un peu folles. Même côté organisation nous allons changer certaines choses pour la nourriture. Tu sais, en 2021, il y a eu de gros problèmes chez les coureurs et dans le staff. C’est un gros problème pour la sécurité de l’événement. C’est pourquoi nous devons améliorer ça.

 

Les deux jours précédant la course seront donc en autosuffisance. Est-ce que l’organisation fournira de l’eau chaude par exemple ?

Oui bien sûr. Les gens pourront réhydrater leurs plats avec de l’eau fournie par l’organisation. Nous ne voulons pas rendre la situation des coureurs plus difficile. Au contraire, ces premiers repas leur permettront d’être plus opérationnels au début de la course.

 

Dans l’annonce que vous avez faite des changements, on arrive à une distance totale comprise entre 201 et 240 km. De nombreuses personnes se sont interrogées sur l’événement, elles ne souhaitent pas qu’il devienne trop accessible, trop facile. Le MDS doit rester une course extrême. Comment les distances et les étapes vont-elles être réparties ?

Tu sais, depuis 35 ans, les distances évoluent déjà entre 200 km et 240, ou même 235. Ça ne va pas changer grand-chose. Ça sera même exactement pareil. Mais la difficulté dépend aussi de combien de fois tu entreprends l’ascension du djebel EL OTFAL par exemple. On ne parle que de distance, mais si tu fais 15 km dans les dunes, ce n’est pas la même chose que 15 km sur un sol plat et dur. Mais nous n’allons pas changer la difficulté, ni proposer une étape longue de 100 km. Beaucoup de gens nous disent « nous pouvons faire plus, nous sommes des ultrarunners », mais je connais la différence entre 80 et 90 km. L’objectif est d’apprécier ton MDS, pas d’être un Finisher avec ta médaille sans aucun plaisir. L’objectif est d’apprécier chaque journée, d’être avec des amis, de voir de superbes paysages. Si je détruis les coureurs avec des étapes de folie, ça n’a pas de sens, ce n’est pas la Barkley. Mon objectif est d’avoir 95% de coureurs heureux à la fin, pas seulement parce qu’ils ont obtenu la médaille, mais parce qu’ils ont apprécié chaque jour. Beaucoup de coureurs disent « ok je suis un Finisher, mais je ne reviendrai pas. » Je n’aime pas ça. L’objectif n’est pas qu’ils reviennent chaque année bien sûr, mais qu’ils se disent « c’était la plus importante aventure de ma vie. Si je devais la refaire, je serais très heureux. » L’exemple de l’édition 2021, en octobre, avec une chaleur extrême, est pertinent, dans le mauvais sens.

 

Par le passé, le MDS a connu de très fortes chaleurs, mais seulement sur une journée. En octobre 2021, ça a duré toute la semaine. Prévois-tu des protocoles particuliers en cas de circonstances exceptionnelles ?

C’est mon job d’anticiper ce genre d’événement, et d’avoir un plan B, un plan C. Par exemple, si nous avons des températures excessives, nous pouvons lancer les étapes deux heures plus tôt. Pour l’organisation, c’est un gros travail supplémentaire, puisque nous devons travailler pendant une bonne partie de la nuit. Mais c’est mon problème. Nous devons le faire pour les coureurs. Nous l’avons déjà fait sur plusieurs HALF MDS. Nous pouvons aussi mettre un peu d’eau fraîche sur le cou de chaque coureur sur les checkpoints. Ça change complètement les choses. C’est un cauchemar de faire ça dans le désert, ça coûte très cher, mais je n’ai pas le choix. Même avec 45°C, tu dois apprécier ton étape. Et s’il fait vraiment trop chaud, ou qu’il y a une tempête, nous pouvons aussi raccourcir un peu une étape, ce n’est pas un problème pour moi. En reconnaissance nous pensons à ça.

 

Rien n’a été communiqué concernant le bivouac et l’itinérance : pas de changements à ce sujet ?

Non, aucun. Des tentes de huit personnes et un nouveau bivouac chaque jour.

 

Le dernier point concerne les voyages. Les Britanniques et les Français avaient cette possibilité de voyager avec les avions de l’organisation et de ne se préoccuper de rien. Désormais, il y a un nombre de places limité sur les avions depuis Londres et Paris. Quelle est l’idée derrière ce changement ?

Premièrement, nous devons nous rappeler que le MDS est une aventure. Et puis il faut comprendre comment fonctionne le transport aérien. Quand vous prenez un avion depuis Londres, c’est très simple et tout le monde adore ça. Mais il faut comprendre qu’une fois qu’il vous a laissé au Maroc, il retourne à Londres à vide. Et c’est la même chose pour le voyage de retour. Et ça parait complètement dingue quand on pense aux problèmes environnementaux. Bien sûr, c’est plus simple d’avoir un vol direct géré par l’organisation. Mais c’est incompatible avec nos engagements environnementaux. C’est pourquoi cette année il y aura un seul avion depuis Londres au lieu de deux, et deux depuis Paris au lieu de cinq. Et c’est amusant parce que j’ai reçu beaucoup de réactions de gens me demandant si je n’étais pas devenu fou, mais non, j’ai une responsabilité. Je suis désolé. Je dois faire mon job. Et finalement, je suis surpris de voir que les gens s’inscrivent majoritairement sans prendre l’option transport aérien. Les gens ont compris dans la majorité la problématique, et j’en suis très heureux. Et peut-être que l’année prochaine, nous n’affréterons plus de vols. Oui, ça prend un jour ou deux de plus pour participer à cette incroyable aventure. Mais dans tous les cas, le MDS, ce n’est pas un voyage ordinaire. Et puis être un jour ou deux de plus au Maroc bénéficie au pays. Ce n’est pas énorme pour chaque personne, mais pour le Maroc ça représente une somme. Et vous aurez plus de temps, vous serez plus tranquille, mieux préparé. Nous sommes au 21e siècle, nous ne pouvons plus faire comme au 20e siècle.

 

Ça permet aussi aux gens de s’organiser par eux-mêmes et de rester un peu avant ou après au Maroc pour profiter du pays. Et puis les compagnies aériennes sont en train de renforcer les vols intérieurs au Maroc, et même directs depuis d’autres pays.

Exact, l’important est de trouver la meilleure solution pour la planète. Nous avons la même démarche pour les véhicules : nous devons réduire le nombre de 4x4 de 30%. De même, nous devons réussir à avoir un seul hélicoptère plutôt que deux. L’un des deux était dédié à la logistique et aux médias, mais nous n’allons garder que celui destiné à la sécurité des coureurs. J’adorerais avoir de superbes photos prises depuis un hélicoptère, mais nous ne pouvons plus faire ça. Nous n’avons pas le droit. Il y a les drones. Ce sont de petites choses, mais mises bout à bout ça fait beaucoup. C’est la même chose pour l’eau, pour les camions… Mon objectif est d’avoir dans cinq ans l’empreinte carbone la plus basse possible.

 

Concernant le voyage, tu as également annoncé qu’il y aurait des navettes gratuites depuis MARRAKECH, comment est-ce organisé ?

En effet, 100% des coureurs pourront prendre une navette depuis MARRAKECH gratuitement. Le plus simple est de faire ce voyage entre le mardi et le jeudi pour être prêt pour la course. Tu dois juste le spécifier lors de ton inscription. Tu choisis le jour et l’heure et tu n’as plus qu’à apprécier le voyage et les vues incroyables en traversant le Maroc. C’est aussi intéressant parce que de nombreux coureurs ne découvrent que le désert au Maroc, et là ça te permet de voir autre chose. Le Maroc est un pays fabuleux. Et la route de MARRAKECH vers le sud au travers de l’Atlas est incroyable. Et ce n’est que quatre heures de voyage. Et puis le truc le plus fou, c’est que quand tu arrives par le vol direct depuis l’Europe, tu vois plein de voitures à la sortie de l’aéroport. Eh bien la plupart sont venues depuis MARRAKECH, à vide. Et pour le retour, c’est la même chose.

 

Le récent tremblement de terre au Maroc a inquiété tout le monde. Tu t’es rendu sur place immédiatement pour faire un gros travail avec les locaux et le staff. Et l’organisation a versé 20000 euros pour aider la population. Quel est l’impact du tremblement de terre sur la prochaine édition du MDS ?

Le lendemain du tremblement de terre, je suis allé au Maroc pour voir nos équipes, dont une grande partie est sur place. Nous étions très anxieux. Mais bien sûr, la course ne se déroule pas dans l’Atlas. Et même si le pays a été durement touché, ça n’impactera pas le MDS. Il y a bien sûr des choses à réparer, mais ce sera fait d’ici là. Nous avons utilisé notre camion et notre staff pour aider les populations. Le HALF MDS Maroc peut se dérouler sans modifications (du 14 au 21 octobre). C’était important d’envoyer de l’argent tout de suite pour parer à l’urgence. Mais maintenant il y a encore tellement de choses à faire.

 

Tu as dit que le MDS allait subir des évolutions, mais pas une révolution. Le changement est difficile, en particulier quand la situation est établie depuis 37 ans. Nous devenons familiers avec les choses, et le changement apparait comme inconfortable. Mais je pense que dans deux ans, plus personne ne contestera les évolutions, et que d’autres seront envisagées. Quelle est ta vision à long terme du MARATHON DES SABLES ?

Comme je le disais, nous n’allons pas changer l’ADN de la course. J’ai couru le MDS en 2009, et ça a été la course la plus incroyable de ma vie. Alors je ne vais pas changer ça. Bien sûr, des petites évolutions peuvent surprendre certaines personnes. Et ces mêmes personnes, dans deux ans, je l’espère, me diront « c’est super, c’est vraiment bien ce que tu as fait ». Mon objectif c’est bien ça, d’organiser cette même course, mais avec des évolutions qui feront que nous l’apprécierons encore plus. Et puis je veux pouvoir lever des fonds pour changer profondément les choses, être plus impliqué avec toute la communauté de coureurs. Et nous devons aussi passer beaucoup plus de temps avec les Britanniques, parce que j’adore leur manière de penser. C’est important de mieux vous comprendre et de vous faire vivre une meilleure expérience. Il faut que le MDS soit la plus incroyable aventure. Je ne veux pas détruire vos corps pour des mois, mais elle doit rester une course difficile. Et si en même temps on peut montrer aux gens que ces courses vont aider la planète, c’est génial. Je veux être fier de ce qu’on réalise ensemble. Marie et Patrick ont construit quelque chose de complètement fou, maintenant nous avons 10 à 15 ans pour garder le meilleur et ajuster quelques points. Peut-être que nous ferons quelques erreurs, mais sans erreurs on ne change rien. Je compte sur les coureurs pour nous faire des retours d’expérience. Revenons sur la nourriture avant la course : pour l’organisation, ça ne représente presque rien financièrement. C’est négligeable. Mais c’est ma responsabilité de m’assurer qu’il n’y aura pas de risques, et ça en fait partie. Tu sais, quand je lis les réponses de participants qui ont dû abandonner, c’est terrible, je me dis que je suis responsable de ça. Alors on doit améliorer ça. Je dois comprendre clairement où nous sommes bons, où nous sommes moins bons. Nous devons avoir les yeux partout. Si je peux améliorer votre expérience, ne serait-ce qu’un tout petit peu, je serai heureux.

 

Merci Cyril pour tous ces détails, c’était très intéressant et je pense que ça donnera pas mal de réponses aux nombreuses interrogations. Rendez-vous sur l’édition 2024 !

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